Une suite réelle $(u_n)$ est dite de Cauchy si ses termes deviennent arbitrairement proches les uns des autres à partir d’un certain rang. Formellement : $$ \forall \epsilon > 0, \exists n_0 \in \mathbb{N} \text{ tel que } \forall p \ge q \ge n_0, \quad |u_p – u_q| \le \epsilon $$
Intuitivement, cela signifie que « la queue de la suite se resserre sur elle-même ».
Une suite de nombres réels est convergente si et seulement si elle est une suite de Cauchy.
Démonstration Détaillée
La démonstration se fait en deux parties.
Partie 1 : Toute suite convergente est une suite de Cauchy
Supposons que la suite $(u_n)$ converge vers une limite finie $l$. Soit $\epsilon > 0$. Par définition de la convergence, il existe un rang $n_0$ tel que pour tout $k \ge n_0$, on a $|u_k – l| < \epsilon/2$.
Soient alors deux entiers $p$ et $q$ tels que $p \ge q \ge n_0$. En utilisant l’inégalité triangulaire, on a : $$ |u_p – u_q| = |(u_p – l) + (l – u_q)| \le |u_p – l| + |u_q – l| $$ Puisque $p \ge n_0$ et $q \ge n_0$, chacun de ces termes est inférieur à $\epsilon/2$. On a donc : $$ |u_p – u_q| < \frac{\epsilon}{2} + \frac{\epsilon}{2} = \epsilon $$ Ceci prouve que la suite est de Cauchy.
Partie 2 : Toute suite de Cauchy (dans $\mathbb{R}$) est convergente
Cette implication est plus profonde et repose sur la complétude de l’ensemble des nombres réels. Soit $(u_n)$ une suite de Cauchy.
- Une suite de Cauchy est bornée : Appliquons la définition de Cauchy avec $\epsilon=1$. Il existe un rang $n_0$ tel que pour tout $p \ge n_0$, $|u_p – u_{n_0}| \le 1$. Par l’inégalité triangulaire, $|u_p| \le 1 + |u_{n_0}|$. L’ensemble des termes de la suite est donc majoré en valeur absolue par $M = \max(|u_0|, \dots, |u_{n_0-1}|, 1+|u_{n_0}|)$. La suite est donc bornée.
- Existence d’une sous-suite convergente : Puisque $(u_n)$ est une suite réelle bornée, le théorème de Bolzano-Weierstrass garantit qu’on peut en extraire une sous-suite $(u_{\varphi(n)})$ qui converge vers une limite $l \in \mathbb{R}$.
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Convergence de la suite entière vers $l$ : Montrons que la suite $(u_n)$ elle-même converge vers $l$. Soit $\epsilon > 0$.
- Comme $(u_n)$ est de Cauchy, il existe un rang $N_1$ tel que pour tout $p,q \ge N_1$, $|u_p – u_q| < \epsilon/2$.
- Comme la sous-suite $(u_{\varphi(n)})$ converge vers $l$, il existe un rang $N_2$ tel que pour tout $n \ge N_2$, $|u_{\varphi(n)} – l| < \epsilon/2$.
On conclut que pour tout $n \ge N$, $|u_n – l| < \epsilon/2 + \epsilon/2 = \epsilon$. La suite $(u_n)$ converge donc bien vers $l$.