Base Préduale
Lemme : Matrice de Passage des Bases Duales

Soit $E$ un K-espace vectoriel de dimension finie, et soient $\beta = (e_1, \dots, e_n)$ et $\gamma = (v_1, \dots, v_n)$ deux bases de $E$. Notons $\beta^*$ et $\gamma^*$ leurs bases duales respectives. Si $P$ est la matrice de passage de $\beta$ à $\gamma$, alors la matrice de passage $Q$ de $\beta^*$ à $\gamma^*$ est donnée par : $$ Q = ({}^t P)^{-1} $$

Démonstration

Soit $P=(p_{ij})$ la matrice de passage de $\beta$ à $\gamma$, donc $v_j = \sum_k p_{kj}e_k$. Soit $Q=(q_{ij})$ la matrice de passage de $\beta^*$ à $\gamma^*$, donc $v_j^* = \sum_k q_{kj}e_k^*$.

Par définition de la base duale, le coefficient $q_{ij}$ de $Q$ est donné par $q_{ij} = \langle e_i, v_j^* \rangle$. D’autre part, le coefficient $\delta_{ij}$ (symbole de Kronecker) est donné par $\delta_{ij} = \langle v_j, v_i^* \rangle$. En utilisant les décompositions, on a : $$ \delta_{ij} = \left\langle \sum_k p_{kj}e_k, \sum_l q_{li}e_l^* \right\rangle = \sum_k \sum_l p_{kj} q_{li} \langle e_k, e_l^* \rangle = \sum_k p_{kj} q_{ki} $$ Cette dernière somme correspond au coefficient $(i,j)$ du produit matriciel ${}^t Q P$. On a donc ${}^t Q P = I_n$, ce qui implique $Q = ({}^t P)^{-1}$.

Théorème : Base Préduale

Soit $E$ un K-espace vectoriel de dimension finie, et soit $(\varphi_1, \dots, \varphi_n)$ une base de son dual $E^*$.

  1. Il existe une unique base $\gamma = (v_1, \dots, v_n)$ de $E$ telle que $(\varphi_1, \dots, \varphi_n)$ soit sa base duale (c’est-à-dire $\forall j, \varphi_j = v_j^*$). Cette base $\gamma$ est appelée la base préduale (ou antéduale) de $(\varphi_1, \dots, \varphi_n)$.
  2. Si $\beta$ est une autre base de $E$, $P$ la matrice de passage de $\beta$ à $\gamma$, et $Q$ la matrice de passage de la base $(\varphi_1, \dots, \varphi_n)$ à la base duale $\beta^*$, alors $P = ({}^t Q)^{-1}$.

Démonstration

i) L’existence et l’unicité d’une telle base découlent de l’isomorphisme entre un espace et son bidual en dimension finie. Pour chaque $j \in \{1, \dots, n\}$, on cherche un vecteur $v_j$ tel que $\varphi_i(v_j) = \delta_{ij}$ pour tout $i$. Comme la famille $(\varphi_1, \dots, \varphi_n)$ est une base de $E^*$, elle est libre. Cela implique que pour tout $j$, l’intersection des noyaux $\bigcap_{i \neq j} Ker(\varphi_i)$ n’est pas contenue dans $Ker(\varphi_j)$. On peut donc trouver un vecteur $x_j$ qui est dans tous les $Ker(\varphi_i)$ pour $i \neq j$, mais pas dans $Ker(\varphi_j)$. En posant $v_j = x_j / \varphi_j(x_j)$, on obtient le vecteur souhaité. On montre ensuite que la famille $(v_j)$ est libre. Ayant $n$ vecteurs dans un espace de dimension $n$, c’est une base.

ii) C’est une application directe du lemme précédent. Ici, la base de $E^*$ est $(\varphi_j)$ qui est la duale de $\gamma$. La matrice $Q$ est la matrice de passage de $(\varphi_j)$ à $\beta^*$. Le lemme nous dit que la matrice de passage de $(\varphi_j)^*$ à $(\beta^*)^*$ est $({}^tQ)^{-1}$. En identifiant $E$ à son bidual $E^{**}$, $(\varphi_j)^*$ s’identifie à $\gamma$ et $(\beta^*)^*$ s’identifie à $\beta$. La matrice de passage de $\gamma$ à $\beta$ est donc $({}^tQ)^{-1}$. La matrice $P$ est la matrice de passage de $\beta$ à $\gamma$, c’est donc l’inverse de la précédente, d’où $P = (({}^tQ)^{-1})^{-1} = {}^tQ$. (Note: il semble y avoir une coquille dans le PDF, la relation correcte est $P={}^t(Q^{-1})$ ou $Q={}^t(P^{-1})$).