Soit $(E, \| \cdot \|)$ un espace vectoriel normé, $x$ un vecteur de $E$ et $A$ une partie non vide de $E$. On définit la distance de x à A, notée $d(x, A)$, comme la borne inférieure des distances entre $x$ et les points de $A$ : $$ d(x, A) = \inf_{y \in A} \|x – y\| $$
Rappelons qu’un espace euclidien est un espace normé, où la norme est induite par le produit scalaire : $\|x\| = \sqrt{\langle x,x \rangle}$.
Soit $E$ un espace euclidien et $F$ un sous-espace vectoriel de $E$. Pour tout vecteur $x \in E$, la distance de $x$ à $F$ est la norme de la différence entre $x$ et son projeté orthogonal sur $F$ : $$ d(x, F) = \|x – p_F(x)\| $$ Cette borne inférieure est donc un minimum, atteint en l’unique point $y=p_F(x)$.
Démonstration
Soit $x \in E$. Pour un vecteur $y$ quelconque dans $F$, on peut décomposer le vecteur $x-y$ de la manière suivante : $$ x – y = (x – p_F(x)) + (p_F(x) – y) $$
Le premier terme, $x – p_F(x)$, appartient au supplémentaire orthogonal $F^\perp$ par définition de la projection orthogonale. Le second terme, $p_F(x) – y$, est une différence de deux vecteurs de $F$, il appartient donc à $F$.
Ces deux termes sont orthogonaux. On peut donc appliquer le théorème de Pythagore : $$ \|x-y\|^2 = \|x – p_F(x)\|^2 + \|p_F(x) – y\|^2 $$ Puisque $\|p_F(x) – y\|^2 \ge 0$, on a toujours $\|x-y\|^2 \ge \|x – p_F(x)\|^2$. En passant à la racine carrée, $\|x-y\| \ge \|x – p_F(x)\|$.
Cette inégalité est vraie pour tout $y \in F$. Le terme de droite est donc un minorant de l’ensemble des distances $\{\|x-y\| \mid y \in F\}$. Par conséquent : $$ \inf_{y \in F} \|x – y\| \ge \|x – p_F(x)\| $$ De plus, comme $p_F(x)$ est un élément de $F$, la distance $\|x – p_F(x)\|$ est l’une des valeurs de l’ensemble. La borne inférieure est donc atteinte pour $y=p_F(x)$, ce qui prouve l’égalité.
Exemple d’Application
Calculons $\inf_{(a,b) \in \mathbb{R}^2} \int_0^1 (t^2 – at – b)^2 dt$.
On se place dans l’espace $E = \mathbb{R}_2[X]$ des polynômes de degré au plus 2, muni du produit scalaire $\langle P, Q \rangle = \int_0^1 P(t)Q(t)dt$. La quantité à minimiser est le carré de la distance entre le polynôme $P(t)=t^2$ et un polynôme quelconque $Q(t)=at+b$ du sous-espace $F = \mathbb{R}_1[X]$.
Le minimum est donc atteint pour $Q = p_F(P)$, le projeté orthogonal de $P$ sur $F$, et la valeur du minimum est $\|P – p_F(P)\|^2$.
On a $P – p_F(P) \in F^\perp$. Cherchons un vecteur non nul dans $F^\perp$. Un polynôme $R(t) = \alpha t^2 + \beta t + \gamma$ est dans $F^\perp$ si $\langle R, 1 \rangle = 0$ et $\langle R, t \rangle = 0$. Ces deux intégrales mènent à un système d’équations qui donne une solution de la forme $R(t) = c(6t^2 – 6t + 1)$.
On a $p_F(P) = P – cR$ pour une certaine constante $c$. On peut aussi calculer directement $p_F(P)$ sur une base orthogonale de $F$. Une autre méthode est de calculer directement $\|P – p_F(P)\|$. On sait que $P-p_F(P)$ est la projection sur $F^\perp$, donc $P-p_F(P) = \frac{\langle P, R \rangle}{\|R\|^2} R$. Le carré de la distance est donc $\frac{(\langle P, R \rangle)^2}{\|R\|^2}$.
Après calcul des intégrales, on trouve $\langle t^2, 6t^2-6t+1 \rangle = 1/30$ et $\|6t^2-6t+1\|^2 = 1/5$. Le carré de la distance est donc $(1/30)^2 / (1/5) = 1/180$.