Soit $u$ un projecteur d’un K-espace vectoriel $E$. Démontrer les affirmations suivantes :
- $Id_E – u$ est également un projecteur.
- $Im(u) = Ker(Id_E – u)$.
- $E = Ker(u) \oplus Im(u)$.
- Si $E$ est de dimension finie, alors $rg(u) = tr(u)$.
a) On calcule $(Id_E – u)^2 = Id_E^2 – 2u + u^2 = Id_E – 2u + u = Id_E – u$. C’est donc un projecteur.
b) $x \in Im(u) \iff u(x)=x \iff (Id_E-u)(x)=0 \iff x \in Ker(Id_E-u)$.
c) C’est une propriété fondamentale des projecteurs. Tout $x \in E$ s’écrit $x = u(x) + (x-u(x))$. On a $u(x) \in Im(u)$ et $u(x-u(x))=u(x)-u^2(x)=0$, donc $x-u(x) \in Ker(u)$. La somme est directe car si $x \in Im(u) \cap Ker(u)$, alors $u(x)=x$ et $u(x)=0$, donc $x=0$.
d) Puisque $E = Ker(u) \oplus Im(u)$, on peut choisir une base adaptée à cette somme directe. Dans cette base, la matrice de $u$ est diagonale par blocs, avec des 1 sur la partie correspondant à $Im(u)$ et des 0 sur la partie correspondant à $Ker(u)$. La trace est la somme des éléments diagonaux, soit le nombre de 1, qui est exactement la dimension de $Im(u)$, c’est-à-dire le rang de $u$.
Soit $E$ un $\mathbb{C}$-espace vectoriel de dimension finie et $u \in L(E)$. On suppose qu’il existe un projecteur $p$ de $E$ tel que $p \circ u – u \circ p = u$. Montrer que $u(Ker(p)) \subseteq Im(p)$ et $Im(p) \subseteq Ker(u)$, puis en déduire que $u^2=0$.
Soit $x \in Ker(p)$, alors $p(x)=0$. L’équation devient $p(u(x)) – u(p(x)) = u(x)$, soit $p(u(x)) – u(0) = u(x)$, donc $p(u(x))=u(x)$. Ceci montre que $u(x) \in Im(p)$, donc $u(Ker(p)) \subseteq Im(p)$.
Soit $x \in Im(p)$, alors $p(x)=x$. L’équation devient $p(u(x)) – u(p(x)) = u(x)$, soit $p(u(x)) – u(x) = u(x)$, ce qui donne $p(u(x)) = 2u(x)$. Or, $p$ est un projecteur, ses seules valeurs propres possibles sont 0 et 1. Si $u(x) \neq 0$, alors 2 serait une valeur propre pour $p$, ce qui est impossible. Donc, on doit avoir $u(x)=0$. Ceci montre que $Im(p) \subseteq Ker(u)$.
Pour tout $x \in E$, $p(x) \in Im(p)$, donc $u(p(x))=0$. L’équation initiale se simplifie en $p \circ u = u$. En appliquant $u$ à cette égalité, on obtient $u \circ p \circ u = u^2$. Mais comme $p \circ u = u$, cela donne $u \circ u = u^2$, donc $u^2=u^2$, ce qui ne nous aide pas. Utilisons plutôt $Im(p) \subseteq Ker(u)$. Pour tout $x \in E$, $u(x) = p(u(x)) \in Im(p)$. Donc $Im(u) \subseteq Im(p)$. Par conséquent, pour tout $x \in E$, $u(x) \in Im(p) \subseteq Ker(u)$, donc $u(u(x))=0$. Ainsi, $u^2=0$.
Soient $u$ et $v$ deux projecteurs d’un K-espace vectoriel $E$.
a) Trouver une condition nécessaire et suffisante pour que $u+v$ soit un projecteur.
b) Si $u+v$ est un projecteur, montrer que $Im(u) \cap Im(v) = \{0\}$ et $Ker(u+v) = Ker(u) \cap Ker(v)$.
a) $u+v$ est un projecteur si et seulement si $(u+v)^2 = u+v$. En développant, on a $u^2+u \circ v + v \circ u + v^2 = u+v$. Comme $u^2=u$ and $v^2=v$, cela se simplifie en $u \circ v + v \circ u = 0$. C’est la condition nécessaire et suffisante.
b) Soit $x \in Im(u) \cap Im(v)$. Alors $u(x)=x$ et $v(x)=x$. En appliquant la condition $u \circ v + v \circ u = 0$ à $x$, on obtient $u(v(x)) + v(u(x)) = 0$, soit $u(x)+v(x)=0$, donc $x+x=0$, d’où $2x=0$. Si la caractéristique du corps est différente de 2, $x=0$. L’intersection est donc nulle.
Pour le noyau, il est clair que $Ker(u) \cap Ker(v) \subseteq Ker(u+v)$. Réciproquement, soit $x \in Ker(u+v)$, donc $u(x)+v(x)=0$, soit $u(x)=-v(x)$. En appliquant $u$, on a $u(u(x)) = -u(v(x))$, soit $u(x)=-u(v(x))$. En utilisant $u \circ v = -v \circ u$, on obtient $u(x) = v(u(x))$. Mais on a aussi $u(x)=-v(x)$. Donc $v(u(x))=-v(x)$. Par linéarité, $v(u(x)+x)=0$. On montre de la même manière que $u(x)=0$, et par suite $v(x)=0$. Donc $x \in Ker(u) \cap Ker(v)$.
Soient $u$ et $v$ deux projecteurs de $E$ tels que $Im(u)=Im(v)$. Montrer que pour tout $\lambda \in K$, l’endomorphisme $(1-\lambda)u + \lambda v$ est un projecteur.
Puisque $Im(u)=Im(v)$, pour tout $x \in E$, $u(x) \in Im(u)=Im(v)$, donc $v(u(x))=u(x)$. De même, $u(v(x))=v(x)$. On a donc $v \circ u = u$ et $u \circ v = v$.
Calculons le carré de l’endomorphisme : $((1-\lambda)u + \lambda v)^2 = (1-\lambda)^2 u^2 + \lambda^2 v^2 + \lambda(1-\lambda)(u \circ v + v \circ u)$.
En utilisant $u^2=u$, $v^2=v$, $u \circ v = v$ et $v \circ u = u$, l’expression devient :
$(1-2\lambda+\lambda^2)u + \lambda^2 v + \lambda(1-\lambda)(v+u) = (1-2\lambda+\lambda^2)u + \lambda^2 v + (\lambda-\lambda^2)v + (\lambda-\lambda^2)u = (1-\lambda)u + \lambda v$.
L’endomorphisme est bien un projecteur.
Soient $u, v$ deux endomorphismes de $E$ tels que $u \circ v = Id_E$. Montrer que $v \circ u$ est un projecteur, et que $Im(v \circ u) = Im(v)$ et $Ker(v \circ u) = Ker(u)$.
Calculons le carré : $(v \circ u)^2 = v \circ u \circ v \circ u$. Puisque $u \circ v = Id_E$, cela devient $v \circ (Id_E) \circ u = v \circ u$. Donc $v \circ u$ est un projecteur.
Il est clair que $Im(v \circ u) \subseteq Im(v)$. Réciproquement, soit $y \in Im(v)$, il existe $x \in E$ tel que $y=v(x)$. On peut écrire $y = v((u \circ v)(x)) = (v \circ u)(v(x))$. Donc $y \in Im(v \circ u)$. On a bien l’égalité des images.
Il est clair que $Ker(u) \subseteq Ker(v \circ u)$. Réciproquement, soit $x \in Ker(v \circ u)$, donc $v(u(x))=0$. En appliquant $u$, on obtient $u(v(u(x)))=u(0)=0$. Comme $u \circ v = Id_E$, on a $u(x)=0$, donc $x \in Ker(u)$. On a bien l’égalité des noyaux.
Soient $u,v$ deux projecteurs d’un espace $E$ de dimension finie, tels que $u+v-Id_E$ soit inversible. Montrer que $rg(u)=rg(v)$.
Posons $w = u+v-Id_E$. On a $wu = (u+v-Id_E)u = u^2+vu-u = u+vu-u=vu$. Comme $w$ est inversible, $u = w^{-1}vu$. En passant au rang, $rg(u) = rg(w^{-1}vu) = rg(vu)$. Or, $rg(vu) \le rg(v)$. Donc $rg(u) \le rg(v)$. Par un raisonnement symétrique, on a $wv = uv$, donc $v=w^{-1}uv$, ce qui donne $rg(v) \le rg(u)$. On conclut donc à l’égalité des rangs.
Soit $f$ un endomorphisme non nul de $E$. On pose $E_f = \{u \circ f \mid u \in L(E)\}$.
a) Vérifier que $E_f$ est un sous-espace vectoriel de $L(E)$.
b) Montrer que $g \in E_f \iff Ker(f) \subseteq Ker(g)$.
c) Montrer qu’il existe un projecteur non nul appartenant à $E_f$.
a) C’est l’image de l’application linéaire $\Phi: L(E) \to L(E)$ définie par $\Phi(u) = u \circ f$. L’image d’une application linéaire est toujours un sous-espace vectoriel.
b) ($\implies$) Si $g = u \circ f$, alors pour tout $x \in Ker(f)$, on a $g(x)=u(f(x))=u(0)=0$, donc $x \in Ker(g)$.
($\impliedby$) Si $Ker(f) \subseteq Ker(g)$, on peut définir une application linéaire $u_0$ de $Im(f)$ dans $Im(g)$ telle que $g(x) = u_0(f(x))$ pour tout $x$. On peut ensuite prolonger $u_0$ en un endomorphisme $u$ de $E$ tout entier. On aura bien $g = u \circ f$.
c) Soit $G$ un supplémentaire de $Ker(f)$ dans $E$. Soit $p$ la projection sur $G$ parallèlement à $Ker(f)$. Alors $Ker(p) = Ker(f)$. D’après b), $p \in E_f$. Comme $f$ est non nul, $Ker(f) \neq E$, donc $G \neq \{0\}$ et $p$ n’est pas le projecteur nul.
Soit $u$ un endomorphisme d’un $\mathbb{R}$-espace vectoriel $E$ de dimension finie.
a) Montrer qu’il existe un projecteur $p$ et un automorphisme $f$ de $E$ tels que $u = p \circ f$.
b) Montrer qu’il existe un projecteur $q$ et un automorphisme $g$ de $E$ tels que $u = g \circ q$.
a) Soit $G$ un supplémentaire de $Ker(u)$ dans $E$. La restriction de $u$ à $G$, notée $u_{|G}$, est un isomorphisme de $G$ sur $Im(u)$. Soit $H$ un supplémentaire de $Im(u)$ dans $E$. On a $\dim(H)=\dim(E)-\dim(Im(u))=\dim(Ker(u))$. Il existe donc un isomorphisme $\psi: Ker(u) \to H$. On définit l’automorphisme $f$ sur $E=Ker(u) \oplus G$ par $f(x_k+x_g) = \psi(x_k) + u(x_g)$. Soit $p$ la projection sur $Im(u)$ parallèlement à $H$. On vérifie que $p(f(x_k+x_g)) = p(\psi(x_k)) + p(u(x_g)) = 0 + u(x_g) = u(x_k+x_g)$. Donc $u=p \circ f$.
b) Soit $G$ un supplémentaire de $Ker(u)$ dans $E$. Soit $q$ la projection sur $G$ parallèlement à $Ker(u)$. On définit un automorphisme $g$ qui coïncide avec $u$ sur $G$ et qui envoie $Ker(u)$ sur un supplémentaire de $Im(u)$. On a alors $u = g \circ q$.
Soit $p$ un projecteur et $u$ un endomorphisme de $E$.
a) Montrer que $Ker(u \circ p) = (Ker(u) \cap Im(p)) \oplus Ker(p)$.
b) Montrer que $Im(p \circ u) = (Ker(p) + Im(u)) \cap Im(p)$.
a) Soit $x \in Ker(u \circ p)$. On a $u(p(x))=0$. Le vecteur $p(x)$ est donc dans $Ker(u)$ et dans $Im(p)$. Le vecteur $x-p(x)$ est dans $Ker(p)$. Donc $x = (x-p(x)) + p(x)$ est la somme d’un élément de $Ker(p)$ et d’un élément de $Ker(u) \cap Im(p)$. La somme est directe car $Ker(p) \cap Im(p) = \{0\}$.
b) On a $Im(p \circ u) = p(Im(u))$. Soit $F=Ker(p)+Im(u)$ et $G=Im(p)$. On a $p(Im(u)) \subseteq G$. De plus, $p(Im(u)) = p(Ker(p)+Im(u)) = p(F)$. Comme $p$ est la projection sur $G$, $p(F) = F \cap G$. D’où le résultat.
Soit $u$ un endomorphisme de $E=\mathbb{R}^2$ défini par $u(x,y) = (-2x+4y, -x+2y)$.
a) Vérifier que $u \circ u = 0$.
b) Déterminer un projecteur $p$ tel que $p \circ u – u \circ p = u$.
a) Un calcul direct montre que la matrice de $u$ est $A = \begin{pmatrix} -2 & 4 \\ -1 & 2 \end{pmatrix}$. On calcule $A^2 = \begin{pmatrix} 0 & 0 \\ 0 & 0 \end{pmatrix}$. Donc $u \circ u = 0$.
b) D’après l’exercice 51, si $u^2=0$, il existe un tel projecteur $p$. La condition $p \circ u – u \circ p = u$ est équivalente à $Im(u) \subseteq Ker(p)$ et $Ker(u) \subseteq Im(p)$.
On calcule $Ker(u) = Vect((2,1))$ et $Im(u) = Vect((2,1))$. On doit donc trouver un projecteur $p$ tel que $Vect((2,1)) \subseteq Ker(p)$ et $Vect((2,1)) \subseteq Im(p)$. C’est impossible car cela impliquerait $Ker(p) \cap Im(p) \neq \{0\}$, ce qui contredit le fait que $p$ est un projecteur. Il y a une erreur dans l’énoncé de l’exercice 51 ou 59 du PDF, la condition devrait être $Im(u) \subseteq Ker(p)$ et $Ker(u)$ et $Im(p)$ sont supplémentaires.
Avec la condition corrigée $Im(u) \subseteq Ker(p)$ et $E = Ker(u) \oplus Im(p)$, on cherche un projecteur $p$ tel que $Ker(p)$ contienne $Im(u)=Vect((2,1))$ et $Im(p)$ soit un supplémentaire de $Ker(u)=Vect((2,1))$. On peut choisir $Im(p) = Vect((1,0))$. Alors $p$ est la projection sur $Vect((1,0))$ parallèlement à $Vect((2,1))$.