Passer d’une forme quadratique à sa forme polaire

Passer d’une Forme Quadratique à sa Forme Polaire

Une forme quadratique $q$ est une fonction qui « ressemble » à un polynôme homogène de degré 2. À chaque forme quadratique est associée une unique forme bilinéaire symétrique $\phi$, appelée sa forme polaire. C’est cette forme polaire qui nous permet de définir la matrice de $q$ et d’étudier ses propriétés géométriques (comme l’orthogonalité).

La Méthode : Identités de Polarisation

La forme polaire $\phi$ est la forme bilinéaire symétrique telle que $q(u) = \phi(u,u)$. Pour retrouver $\phi(u,v)$ à partir de $q$, on utilise l’une des identités de polarisation :

  • $\phi(u,v) = \frac{1}{2} [ q(u+v) – q(u) – q(v) ]$
  • $\phi(u,v) = \frac{1}{4} [ q(u+v) – q(u-v) ]$

La première est souvent la plus directe à utiliser pour des calculs théoriques.

L’Astuce Pratique (dédoublement des variables)

Pour les formes quadratiques sur $\mathbb{R}^n$, il existe une méthode beaucoup plus rapide :

  • Un terme au carré comme $ax_i^2$ devient $ax_{i,1}x_{i,2}$.
  • Un terme rectangle comme $bx_ix_j$ devient $b \cdot \frac{1}{2}(x_{i,1}x_{j,2} + x_{i,2}x_{j,1})$.

Où les variables avec l’indice 1 correspondent au premier vecteur et celles avec l’indice 2 au second.

Exemple 1 : Forme quadratique sur $\mathbb{R}^2$

Soit $q(x,y) = 2x^2 + 6xy – 7y^2$. Cherchons sa forme polaire $\phi(u,v)$ avec $u=(x_1, y_1)$ et $v=(x_2, y_2)$.

Avec l’astuce du dédoublement :
– Le terme $2x^2$ devient $2x_1x_2$.
– Le terme $6xy$ devient $6 \cdot \frac{1}{2}(x_1y_2 + x_2y_1) = 3(x_1y_2 + x_2y_1)$.
– Le terme $-7y^2$ devient $-7y_1y_2$.

Conclusion : $\phi((x_1,y_1), (x_2,y_2)) = 2x_1x_2 + 3x_1y_2 + 3x_2y_1 – 7y_1y_2$.

Exemple 2 : Forme quadratique sur $\mathbb{R}^3$

Soit $q(x,y,z) = x^2 – y^2 + 5z^2 – 8xy + 2yz$.
Cherchons sa forme polaire $\phi(u,v)$ avec $u=(x_1,y_1,z_1)$ et $v=(x_2,y_2,z_2)$.

– $x^2 \to x_1x_2$
– $-y^2 \to -y_1y_2$
– $5z^2 \to 5z_1z_2$
– $-8xy \to -4(x_1y_2 + x_2y_1)$
– $2yz \to 1(y_1z_2 + y_2z_1)$

Conclusion :
$\phi(u,v) = x_1x_2 – y_1y_2 + 5z_1z_2 – 4(x_1y_2 + x_2y_1) + (y_1z_2 + y_2z_1)$.

Exemple 3 : Sur un espace de fonctions

Soit $E$ l’espace des fonctions continues de $[0,1]$ dans $\mathbb{R}$.
Soit $q(f) = \int_0^1 f(t)^2 dt$.

Ici, l’astuce ne s’applique pas, il faut utiliser l’identité de polarisation.
$\phi(f,g) = \frac{1}{2} [ q(f+g) – q(f) – q(g) ]$.

$q(f+g) = \int_0^1 (f(t)+g(t))^2 dt = \int_0^1 (f(t)^2 + 2f(t)g(t) + g(t)^2) dt$
$= \int_0^1 f(t)^2 dt + \int_0^1 g(t)^2 dt + 2\int_0^1 f(t)g(t) dt$
$= q(f) + q(g) + 2\int_0^1 f(t)g(t) dt$.

$q(f+g) – q(f) – q(g) = 2\int_0^1 f(t)g(t) dt$.
En divisant par 2, on obtient :
$\phi(f,g) = \int_0^1 f(t)g(t) dt$.
On reconnaît le produit scalaire usuel sur cet espace de fonctions.