Reconnaître un endomorphisme symétrique (autoadjoint)

Reconnaître un endomorphisme symétrique (autoadjoint)

Un endomorphisme symétrique (ou autoadjoint) est une transformation linéaire qui préserve la structure géométrique d’un espace euclidien d’une manière très spéciale. Leur propriété la plus célèbre est qu’ils sont toujours diagonalisables dans une base orthonormale. Mais comment les identifier à coup sûr ?

La Méthode Infaillible : La Matrice

La façon la plus simple et la plus sûre de reconnaître un endomorphisme symétrique est de regarder sa matrice.

Un endomorphisme $f$ est symétrique si et seulement si sa matrice $A$ dans n’importe quelle base orthonormale est une matrice symétrique (c’est-à-dire que $A = A^T$).

Attention : Le mot clé ici est orthonormale. La base canonique de $\mathbb{R}^n$ est orthonormale, ce qui la rend très pratique pour ce test. Si la base n’est pas orthonormale, la symétrie de la matrice ne garantit rien !

Exemple 1 : Matrice donnée dans la base canonique

Soit $f$ un endomorphisme de $\mathbb{R}^3$ dont la matrice dans la base canonique (qui est orthonormale) est :
$A = \begin{pmatrix} 1 & -2 & 0 \\ -2 & 5 & 7 \\ 0 & 7 & -3 \end{pmatrix}$.

La matrice $A$ est-elle symétrique ? Oui, car $A^T = A$.
La base est-elle orthonormale ? Oui, c’est la base canonique.

Conclusion : $f$ est un endomorphisme symétrique.

Exemple 2 : Endomorphisme défini par sa formule

Soit $f: \mathbb{R}^2 \to \mathbb{R}^2$ l’application définie par $f(x, y) = (3x + 5y, 5x – 2y)$.

1. On détermine sa matrice dans la base canonique $\mathcal{B}_c = (e_1, e_2)$ :
$f(e_1) = f(1, 0) = (3, 5) = 3e_1 + 5e_2$.
$f(e_2) = f(0, 1) = (5, -2) = 5e_1 – 2e_2$.

La matrice de $f$ dans la base canonique est donc $A = \begin{pmatrix} 3 & 5 \\ 5 & -2 \end{pmatrix}$.

La matrice $A$ est symétrique et la base est orthonormale.
Conclusion : $f$ est un endomorphisme symétrique.

Exemple 3 : Le piège de la base non-orthonormale

Soit un endomorphisme $f$ de $\mathbb{R}^2$. On considère la base $\mathcal{B} = (v_1, v_2)$ avec $v_1=(1,0)$ et $v_2=(1,1)$.
Cette base n’est pas orthonormale car $\langle v_1, v_2 \rangle = 1 \neq 0$.
Supposons que la matrice de $f$ dans cette base $\mathcal{B}$ soit $A_{\mathcal{B}} = \begin{pmatrix} 1 & 0 \\ 0 & 0 \end{pmatrix}$. Cette matrice est symétrique.

Question : $f$ est-il symétrique ? Pour le savoir, il faut trouver sa matrice dans la base canonique $\mathcal{B}_c=(e_1, e_2)$.
On sait que $f(v_1) = 1 \cdot v_1 + 0 \cdot v_2 = v_1$ et $f(v_2) = 0 \cdot v_1 + 0 \cdot v_2 = 0$.

On exprime l’action de $f$ sur les vecteurs de la base canonique :
$v_1 = e_1$, donc $f(e_1) = f(v_1) = v_1 = e_1 = (1, 0)$.
$v_2 = e_1 + e_2$, donc $e_2 = v_2 – v_1$.
$f(e_2) = f(v_2 – v_1) = f(v_2) – f(v_1) = 0 – v_1 = -v_1 = -e_1 = (-1, 0)$.

La matrice de $f$ dans la base canonique est $A_{\mathcal{B}_c} = \begin{pmatrix} 1 & -1 \\ 0 & 0 \end{pmatrix}$.
Cette matrice n’est pas symétrique.

Conclusion : $f$ n’est pas un endomorphisme symétrique, même si sa matrice dans la base non-orthonormale $\mathcal{B}$ l’était.

Le Théorème Spectral : La Récompense

L’intérêt majeur des endomorphismes symétriques est révélé par le puissant Théorème Spectral :
Un endomorphisme est symétrique si et seulement s’il est diagonalisable dans une base orthonormale.

Cela signifie que pour tout endomorphisme symétrique, on peut trouver une base de vecteurs propres qui sont tous orthogonaux entre eux. C’est une propriété fondamentale en mécanique quantique, en analyse de données (ACP) et dans de nombreux autres domaines scientifiques.