Théorème de Green-Tao
Contexte : Progressions Arithmétiques

Une progression arithmétique de longueur $k$ est une suite de $k$ nombres de la forme : $$ a, a+d, a+2d, \dots, a+(k-1)d $$ où $a$ est le premier terme et $d$ est la raison.

Le théorème de van der Waerden (1927) affirme que si l’on colorie les entiers avec un nombre fini de couleurs, on trouvera toujours une progression arithmétique monochrome de longueur arbitraire. Une conséquence plus forte est le théorème de Szemerédi (1975), qui stipule que tout sous-ensemble d’entiers ayant une « densité » positive contient des progressions arithmétiques arbitrairement longues.

Cependant, l’ensemble des nombres premiers a une densité nulle. Ces théorèmes ne s’appliquaient donc pas directement, et la question de savoir si les nombres premiers contenaient de telles progressions est restée une conjecture ouverte pendant des décennies.

Théorème de Green-Tao (2004)

L’ensemble des nombres premiers contient des progressions arithmétiques de longueur arbitraire.

Autrement dit, pour tout entier $k \ge 3$, il existe une progression arithmétique de longueur $k$ constituée uniquement de nombres premiers.

Esquisse de la Démonstration

La démonstration de Ben Green et Terence Tao est considérée comme l’un des résultats les plus importants en mathématiques du début du XXIe siècle. Elle est extrêmement complexe et combine des techniques de plusieurs domaines : combinatoire, analyse harmonique, et théorie ergodique.

  1. Principe de Transfert : L’idée maîtresse est un « principe de transfert ». Puisque les nombres premiers sont trop « rares » (densité nulle) pour appliquer directement le théorème de Szemerédi, Green et Tao ont montré que les nombres premiers se comportent, d’un point de vue statistique et additif, de manière très similaire à un ensemble de nombres « pseudo-aléatoires » ayant une densité légèrement supérieure.
  2. Théorème de Szemerédi : Ils ont ensuite prouvé une version plus forte du théorème de Szemerédi, montrant qu’il s’applique non seulement aux ensembles denses, mais aussi à ces ensembles pseudo-aléatoires plus généraux.
  3. Conclusion : En combinant ces deux points, ils ont pu « transférer » le résultat du théorème de Szemerédi à l’ensemble des nombres premiers. Si un ensemble pseudo-aléatoire qui « ressemble » aux premiers contient de longues progressions arithmétiques, alors les premiers eux-mêmes doivent en contenir.

Implications et Exemples

  • Ce théorème est purement un théorème d’existence. Il ne fournit pas de méthode pour construire de telles progressions. La recherche de longues progressions arithmétiques de nombres premiers est un domaine de calcul intensif.
  • Exemples de progressions arithmétiques de nombres premiers :
    • Longueur 3 : (3, 5, 7) avec une raison de 2.
    • Longueur 5 : (5, 11, 17, 23, 29) avec une raison de 6.
    • Longueur 10 : (199, 409, 619, 829, 1039, 1249, 1459, 1669, 1879, 2089) avec une raison de 210.
  • Le record actuel (en 2024) est une progression de 27 termes, découverte par le projet « PrimeGrid ».
  • Le théorème de Green-Tao a ouvert un nouveau champ de recherche en combinatoire additive, qui étudie les structures additives (comme les progressions arithmétiques) au sein d’ensembles de nombres.