Soit $E$ un espace euclidien, c’est-à-dire un $\mathbb{R}$-espace vectoriel de dimension finie muni d’un produit scalaire $\langle \cdot, \cdot \rangle$.
- Une forme linéaire sur $E$ est une application linéaire $\varphi: E \to \mathbb{R}$.
- L’espace dual de $E$, noté $E^*$, est l’ensemble de toutes les formes linéaires sur $E$. C’est un espace vectoriel de même dimension que $E$.
Le théorème de représentation de Riesz établit un pont naturel et unique entre les vecteurs de $E$ et les formes linéaires de $E^*$.
Soit $E$ un espace euclidien. Pour toute forme linéaire $\varphi \in E^*$, il existe un unique vecteur $y \in E$ tel que, pour tout vecteur $x \in E$, l’évaluation de la forme linéaire soit égale au produit scalaire avec ce vecteur : $$ \forall x \in E, \quad \varphi(x) = \langle x, y \rangle $$
Démonstration Détaillée
La démonstration repose sur le fait que le produit scalaire est non dégénéré.
- Construction de l’application : On définit une application $\Phi: E \to E^*$ qui à un vecteur $y \in E$ associe la forme linéaire $\varphi_y$ définie par $\varphi_y(x) = \langle x, y \rangle$. On vérifie facilement que $\Phi$ est une application linéaire.
- Injectivité : Montrons que $\Phi$ est injective. Pour cela, on calcule son noyau. $$ y \in Ker(\Phi) \iff \Phi(y) = 0_{E^*} \iff \forall x \in E, \varphi_y(x) = 0 \iff \forall x \in E, \langle x, y \rangle = 0 $$ Le noyau de $\Phi$ est donc l’orthogonal de l’espace $E$ tout entier, $E^\perp$. Or, dans un espace euclidien, le produit scalaire est non dégénéré, ce qui signifie que $E^\perp = \{0_E\}$. Le noyau de $\Phi$ est donc trivial, et l’application est injective.
- Isomorphisme : L’application $\Phi$ est une application linéaire injective entre deux espaces vectoriels de même dimension finie ($\dim(E) = \dim(E^*)$). C’est donc un isomorphisme.
- Conclusion : Puisque $\Phi$ est un isomorphisme, elle est surjective. Cela signifie que pour toute forme linéaire $\varphi \in E^*$, il existe un antécédent $y \in E$ tel que $\Phi(y) = \varphi$. Cet antécédent est unique car $\Phi$ est injective. Par définition de $\Phi$, cela signifie qu’il existe un unique $y \in E$ tel que pour tout $x \in E$, $\langle x, y \rangle = \varphi(x)$.
Implications et Applications
- Isomorphisme Canonique : Ce théorème établit un isomorphisme canonique (c’est-à-dire qui ne dépend pas du choix d’une base) entre un espace euclidien et son dual. Il permet d’identifier les vecteurs et les formes linéaires.
- Physique Quantique (Notation de Dirac) : En mécanique quantique, les états d’un système sont représentés par des vecteurs dans un espace de Hilbert (un espace hermitien complet). Un vecteur « ket » $| \psi \rangle$ est un vecteur de cet espace. Une forme linéaire (un élément du dual) est appelée un « bra » et notée $\langle \phi |$. Le théorème de Riesz garantit que chaque « bra » correspond à un unique « ket ». L’application de la forme linéaire $\langle \phi |$ au vecteur $| \psi \rangle$ est alors notée $\langle \phi | \psi \rangle$, ce qui coïncide avec la notation du produit scalaire hermitien.
- Analyse Fonctionnelle : Le théorème se généralise aux espaces de Hilbert de dimension infinie, où il est un résultat absolument fondamental.