Soit $E$ un K-espace vectoriel.
- Une application linéaire de $E$ dans lui-même ($u: E \to E$) est appelée un endomorphisme de $E$.
- Un endomorphisme qui est également bijectif est appelé un automorphisme de $E$.
Notations
On désigne par $L_K(E)$ l’ensemble de tous les endomorphismes de $E$, et par $GL_K(E)$ l’ensemble de tous les automorphismes de $E$.
Soit $(A, +, \times)$ un anneau et $K$ un corps commutatif. On dit que $A$ est une K-algèbre si elle est également munie d’une loi externe $K \times A \to A$, notée $(\lambda, x) \mapsto \lambda \cdot x$, qui satisfait deux conditions :
- $(A, +, \cdot)$ est un K-espace vectoriel.
- La loi externe est compatible avec la multiplication de l’anneau : $\forall \lambda \in K, \forall x, y \in A, \quad \lambda \cdot (x \times y) = (\lambda \cdot x) \times y = x \times (\lambda \cdot y)$.
Exemple
Pour tout corps commutatif $K$, l’anneau des polynômes $(K[X], +, \times)$ muni de la multiplication par un scalaire est une K-algèbre.
Soit $E$ un K-espace vectoriel.
- L’ensemble des endomorphismes $(L_K(E), +, \circ, \cdot)$, où $\circ$ est la composition des applications, forme une K-algèbre appelée algèbre des endomorphismes de E.
- L’ensemble des automorphismes $(GL_K(E), \circ)$ forme un groupe, appelé groupe linéaire de E.
Remarque
Pour un endomorphisme $u$ d’un espace $E$ de dimension finie, le théorème du rang nous assure que $\dim(E) = \dim(Ker(u)) + \dim(Im(u))$. Cependant, cela n’implique pas toujours que $E$ soit la somme directe de ces deux sous-espaces, c’est-à-dire $E = Ker(u) \oplus Im(u)$. Le théorème suivant précise les conditions pour que cela soit vrai.
Soit $u$ un endomorphisme d’un K-espace vectoriel $E$ de dimension finie. Les propositions suivantes sont équivalentes :
- $E = Ker(u) \oplus Im(u)$.
- $Im(u) = Im(u^2)$.
- $Ker(u) = Ker(u^2)$.
- $Ker(u) \cap Im(u) = \{0\}$.
Démonstration
(i $\implies$ ii) On a toujours $Im(u^2) \subseteq Im(u)$. Montrons l’inclusion inverse. Soit $y \in Im(u)$, il existe $x \in E$ tel que $y=u(x)$. Comme $E = Ker(u) \oplus Im(u)$, $x$ s’écrit $x_1 + u(x_2)$ avec $x_1 \in Ker(u)$. Alors $y = u(x_1 + u(x_2)) = u(x_1) + u(u(x_2)) = 0 + u^2(x_2) = u^2(x_2)$. Donc $y \in Im(u^2)$.
(ii $\iff$ iii) L’équivalence découle directement du théorème du rang. On a toujours $Ker(u) \subseteq Ker(u^2)$. Le théorème du rang donne $\dim(E) = \dim(Ker(u)) + \dim(Im(u))$ et $\dim(E) = \dim(Ker(u^2)) + \dim(Im(u^2))$. Si $Im(u)=Im(u^2)$, alors leurs dimensions sont égales, ce qui force $\dim(Ker(u)) = \dim(Ker(u^2))$. L’inclusion et l’égalité des dimensions impliquent $Ker(u) = Ker(u^2)$. La réciproque est identique.
(iii $\implies$ iv) Soit $y \in Ker(u) \cap Im(u)$. Alors $u(y)=0$ et il existe $x \in E$ tel que $y=u(x)$. On a donc $u^2(x) = u(y) = 0$, ce qui signifie que $x \in Ker(u^2)$. Par hypothèse, $Ker(u^2)=Ker(u)$, donc $x \in Ker(u)$. Par conséquent, $y=u(x)=0$.
(iv $\implies$ i) Le théorème du rang nous donne $\dim(Ker(u)) + \dim(Im(u)) = \dim(E)$. Cette condition, jointe à $Ker(u) \cap Im(u) = \{0\}$, est la définition d’une somme directe $E = Ker(u) \oplus Im(u)$.
Soit $u$ un endomorphisme d’un K-espace vectoriel $E$ de dimension finie. Il existe un entier $p \ge 1$ (appelé indice de l’endomorphisme) tel que :
- Les suites de sous-espaces $(Ker(u^k))_{k \in \mathbb{N}}$ et $(Im(u^k))_{k \in \mathbb{N}}$ sont stationnaires à partir du rang $p$. C’est-à-dire, $\forall k \ge p, Ker(u^k)=Ker(u^p)$ et $Im(u^k)=Im(u^p)$.
- Les inclusions sont strictes avant le rang $p$ : $Ker(u^{p-1}) \subsetneq Ker(u^p)$ et $Im(u^p) \subsetneq Im(u^{p-1})$.
- L’espace $E$ se décompose en somme directe : $E = Ker(u^p) \oplus Im(u^p)$.
Remarque
Les sous-espaces $N = \bigcup_{k \in \mathbb{N}} Ker(u^k) = Ker(u^p)$ et $I = \bigcap_{k \in \mathbb{N}} Im(u^k) = Im(u^p)$ sont appelés respectivement le nilespace et le cœur de $u$. Ils sont supplémentaires.